le 18/03/2020

Précisions sur la personne compétente pour octroyer les autorisations d’occupation du domaine public aux exploitants de réseaux ouverts au public visés au premier alinéa précité de l’article L. 45-9 du Code des postes et communications électroniques

CE, 24 février 2020, Département des Hauts de Seine, n° 427280

Par une décision du 24 février 2020, le Conseil d’État a tranché la question tendant à savoir si la délégation à un tiers de la gestion du service public exploité au moyen d’un réseau (d’assainissement ici) relevant du domaine public emporte automatiquement transfert au délégataire de la compétence d’autoriser l’occupation dudit domaine public à un exploitant de réseau de communications électroniques sur le fondement de l’article L. 45-9 du Code des postes et des communications électroniques. 

En l’espèce, le département des Hauts-de-Seine a conclu, le 31 décembre 1993, avec la société des Eaux de Versailles et de Saint-Cloud (ci-après, la « SEVESC »), une concession de service public ayant pour objet l’assainissement et la gestion des ouvrages publics nécessaires au bon fonctionnement de ce service.  

Par ailleurs, le 30 novembre 2007, le département des Hauts-de-Seine et la société Colt Technology Services (ci-après, la « société CTS ») ont conclu une convention d’autorisation du domaine public aux termes de laquelle le département autorisait la société CTS, sur le fondement de l’article L. 45-9 du Code des postes et des communications électroniques, à occuper le réseau d’assainissement départemental en vue de l’exploitation d’un réseau de communications électroniques par ladite société. 

Au titre de l’année 2015, le département des Hauts-de-Seine a émis à l’encontre de la société CTS un titre exécutoire en vue du recouvrement de la redevance correspondant à cette occupation du domaine public.  

La société CTS a alors saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise pour obtenir l’annulation du titre exécutoire au motif que la SEVESC était seule compétente, en sa qualité de concessionnaire du service public d’assainissement, pour délivrer l’autorisation d’occupation du domaine public portant sur le réseau d’assainissement que le département lui avait donné en exploitation.  Le Tribunal administratif a rejeté sa demande mais la Cour administrative d’appel de Versailles a, sur appel de la société CTS, annulé ce jugement et le titre exécutoire litigieux. Le département des Hauts-de-Seine s’est donc pourvu en cassation contre cet arrêt. 

Dans le cadre de cette affaire, il revenait au Conseil d’État de trancher la question de droit suivante : la délégation à un tiers de la gestion du service public exploité au moyen d’un réseau public relevant du domaine public routier ou non entraîne elle nécessairement un transfert au délégataire de la compétence pour autoriser l’occupation de ce réseau par (ici) les exploitants de réseaux ouverts au public visés au premier alinéa précité de l’article L. 45-9 du Code des postes et communications électroniques. 

Le Conseil d’État répond par la négative. Il commence par rappeler les termes des articles L. 45-9 et L.47-1 du Code des postes et communications électroniques et déduit de ces articles qu’ « il ne résulte ni de ces dispositions, ni d’aucun texte, que la délégation à un tiers de la gestion du service public exploité au moyen d’un réseau public relevant du domaine public routier ou non entraîne nécessairement, dans le silence de la convention, le transfert au concessionnaire de la compétence pour autoriser l’occupation de ce réseau par les exploitants de réseaux ouverts au public visés au premier alinéa précité de l’article L. 45-9 du Code des postes et communications électroniques, ainsi que pour fixer et percevoir les redevances correspondantes ». 

Appliquant le principe ainsi dégagé au cas d’espèce, le Conseil d’État juge que la cour administrative d’appel de Versailles ne pouvait pas se fonder, pour faire droit aux conclusions de la société CTS, sur le fait qu’il n’appartenait qu’à la SEVESC, concessionnaire du service public départemental de l’assainissement et gestionnaire des ouvrages publics nécessaires au bon fonctionnement de ce service, d’octroyer les permissions d’occupation du domaine public constitué par le réseau départemental d’assainissement et de percevoir les redevances correspondantes dès lors que cette compétence ne lui avait pas été expressément transférée par le département des Hauts-de-Seine dans le cadre de la délégation de service public

Au surplus, le Conseil d’État souligne que l’avenant au contrat de concession conclu entre le département Hauts-de-Seine et la SEVESC aux termes duquel ils avaient convenu que « toute utilisation du patrimoine qui ne répondrait pas aux nécessités du service public de l’assainissement relève de la compétence du Département en sa qualité de propriétaire des ouvrages et équipements, et autorité organisatrice du service d’assainissement » se bornait à rappeler le principe dégagé par le Conseil d’État et n’avait pas eu pour effet de confier à la SEVESC la compétence pour octroyer l’occupation de ce réseau par les exploitants de réseaux ouverts au public visés au premier alinéa précité de l’article L. 45-9 du Code des postes et communications électroniques, ainsi que pour fixer et percevoir les redevances correspondantes. 

En conclusion, le Conseil d’État annule l’arrêt litigieux et, n’usant pas de son pouvoir d’évocation, renvoie l’affaire devant la Cour administrative d’appel de Versailles.