le 15/03/2017

Précisions sur les règles applicables à la délivrance et au régime contentieux des permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale

CE Avis, 23 décembre 2016, n° 398077 : Rec. CE

Par un avis – attendu – en date du 23 décembre 2016, le Conseil d’Etat a précisé les règles applicables à la délivrance et au régime contentieux des permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale.

Il convient de rappeler que l’article L. 425-4 du Code de l’urbanisme issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises prévoit que le permis de construire tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale « dès lors que la demande de permis a fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial ou, le cas échéant, de la commission nationale d’aménagement commercial » (dispositions entrées en vigueur le 15 février 2015 – décret  n° 2015-165 du 12 février 2015 relatif à l’aménagement commercial).

Interrogé, dans le cadre d’une demande d’avis, par la Cour administrative d’appel de Nancy sur ce nouveau régime (CAA Nancy, 17 mars 2016, n° 15NC02351), le Conseil d’Etat a apporté les précisions suivantes :

  1. Tout d’abord, dans l’hypothèse d’un recours contre l’avis de la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC), l’autorité compétente doit attendre l’avis de la commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) avant de délivrer le permis de construire ; l’avis de la CNAC se substituant à celui de la CDAC.

Le Conseil d’Etat rappelle, d’ailleurs, que le délai d’instruction de la demande est prorogé de cinq mois en cas de recours devant la CNAC (article R. 423-36-1 du Code de l’urbanisme).

Cela étant, la délivrance du permis de construire avant que la CNAC ne rende son avis  n’entacherait pas le permis de construire « d’illégalité de ce seul fait ». Le Conseil d’Etat précise en effet que « l’insécurité qui résulterait de ce que sa légalité pourrait être mise ultérieurement en cause à raison d’un avis négatif de la Commission nationale, que celle-ci soit saisie d’un recours ou qu’elle s’autosaisisse, conduit toutefois à recommander à l’administration d’éviter de délivrer le permis avant l’expiration de ces délais ».

  1. Plusieurs précisions sont ensuite apportées quant au régime contentieux applicable.

Ainsi, que le permis de construire soit contesté dans son volet « autorisation d’urbanisme » ou « autorisation d’exploitation commerciale », le délai de recours court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain du permis (article R. 600-2 du Code de l’urbanisme).

Sur ce point, il convient toutefois de réserver l’hypothèse évoquée ci-dessus dans laquelle le permis de construire aurait été délivré avant un avis négatif de la CNAC. Dans ce cas, le Conseil d’Etat précise que « dans tous les cas où la Commission nationale d’aménagement commercial, régulièrement saisie, est amenée à rendre son avis après la délivrance du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, la publication de cet avis dans les conditions fixées à l’article R. 752-39 du Code de commerce ouvre, à l’égard des requérants mentionnés au I de l’article L. 752-17 du Code de commerce [personnes ayant intérêt à agir contre le volet autorisation d’exploitation commerciale du permis de construire], y compris si le délai déclenché dans les conditions prévues par l’article R. 600-2 du Code de l’urbanisme est expiré, un délai de recours de deux mois contre le permis ».

Autrement dit, un nouveau délai de recours contre le permis de construire en tant qu’il vaut autorisation d’exploitation commerciale court à compter de la publication de l’avis défavorable de la CNAC.

Par ailleurs, tout recours contre le permis de construire – en tant qu’il vaut autorisation de construire ou d’exploitation commerciale – est soumis à l’obligation de notification prévue par les dispositions de l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme.

  1. Enfin, le Conseil d’Etat précise les conséquences à tirer d’une annulation du permis de construire en tant qu’il vaut autorisation d’exploitation commerciale.

Sur ce point, il convient de rappeler que les professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du Code de commerce ne peuvent régulièrement saisir le Juge administratif de conclusions tendant à l’annulation d’un permis valant autorisation d’exploitation commerciale qu’en tant que ce permis tient lieu d’une telle autorisation.

Lorsque le Juge administratif entend faire droit à de telles conclusions, l’annulation ne pourra porter que sur le volet exploitation commerciale de l’autorisation. L’avis précise néanmoins que « le permis de construire ne pouvant être légalement délivré que si le pétitionnaire dispose d’une autorisation d’urbanisme commercial, son annulation en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’urbanisme commercial fait obstacle à la réalisation du projet ».

Tirant les conséquences de cette annulation partielle, le Conseil d’Etat prévoit que, pour mettre le projet en conformité avec la chose jugée par la décision, « un nouveau permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale peut, à la demande du pétitionnaire, être délivré au seul vu d’un nouvel avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial compétente ou, le cas échéant, de la commission nationale ».

Il est également rappelé que les dispositions de l’article L. 600-5-1 permettant au Juge administratif de sursoir à statuer afin de permettre de régulariser l’acte attaqué sont applicables aux permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale.