le 09/11/2017

Précisions sur l’intérêt à agir des associations contre une autorisation de construire

CE, 20 octobre 2017, n°400585

L’intérêt pour agir d’une association contre un acte administratif est apprécié tant au regard de la nature des intérêts qu’elle défend que de son champ d’action.

D’une part, le critère de la spécialité de l’objet statutaire est retenu par le juge administratif pour qualifier l’intérêt pour agir. Une association doit justifier que la décision qu’elle attaque affecte véritablement les intérêts qu’elle a pour mission de défendre.

Par exemple, le recours d’une association de défense de l’environnement ayant un objet social trop vaste au regard de l’importance du projet qu’elle conteste est irrecevable (CE, 27 mai 1991, n° 113203 ; CE, 29 janvier 2003, n° 199692).

Inversement, la définition d’un objet statutaire trop circonscrit ne permet pas à l’Association requérante de contester un schéma régional (CAA Lyon, 3 mai 2016, n°14LY00473).

D’autre part, l’intérêt pour agir d’une association est admis lorsque son périmètre d’action géographique est défini de façon suffisamment précise (CE, 20 mars 1974, n° 90212 ; CE, 31 décembre1976, n° 03164).

A ce titre, le juge administratif a considéré qu’en l’absence d’indication permettant de définir un champ d’intervention localement délimité, l’association sera regardée comme ayant un champ d’intervention national trop vaste pour contester des projets locaux (CE 23 février 2004, n° 250482 ; CE, 5 novembre 2004, n° 264819).

Par conséquent, lorsque le juge administratif constate qu’une association s’est donnée un ressort d’action plus large que celui de l’acte attaqué, national régional ou départemental, l’intérêt à agir n’est en principe pas admis.

Enfin,  une association requérante doit être en mesure de démontrer le lien entre son objet statutaire et les effets de l’acte qu’elle conteste. A défaut, elle est jugée irrecevable pour défaut d’intérêt à agir (CAA Lyon, 8 mars 2016, n°14LY01495).

Cette décision du 20 octobre 2017 donne l’occasion au Conseil d’Etat de revenir sur l’appréciation de l’intérêt à agir des associations, lesquelles avaient été exclues, avec les personnes publiques, du champ d’application du nouvel article L.600-1-2 du Code de l’urbanisme introduit par l’ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l’urbanisme.

Dans cette affaire, une association de défense de l’environnement et du cadre de vie d’un quartier a introduit un recours contre un permis de construire délivré par le maire à une société pour la construction de trois pavillons résidentiel.

En première instance, le Tribunal administratif a rejeté par ordonnance la requête pour défaut d’intérêt à agir jugeant que l’objet statutaire de l’association restait « trop général et éloigné des considérations d’urbanisme pour lui conférer un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis ».

Saisi du recours contre cette ordonnance, le Conseil d’Etat a considéré que l’association requérante était fondée à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée en ce que « le projet autorisé, par sa nature, le nombre de constructions autorisées, le choix d’implantation retenu et la densification qu’il induisait, était susceptible de porter atteinte au cadre de vie des habitants du quartier de l’Epi d’or, dont l’association requérante avait pour objet d’assurer la sauvegarde ».

En d’autres termes, par cette décision, le Conseil d’Etat précise qu’une association, dont l’objet statutaire est seulement d’assurer la sauvegarde du cadre de vie des habitants d’un quartier, est recevable à introduire un recours contre une autorisation de construire, en se prévalant des désagréments qui peuvent découler d’un projet immobilier sur la qualité de vie d’un quartier.

Toutefois, il incombe donc aux associations, dont le champ d’action se borne à la préservation du cadre de vie des habitants, de démontrer l’ampleur du projet de construction autorisée et de justifier leur intérêt à agir au moyen de plusieurs critères que sont la nature du projet, le nombre de constructions, le secteur d’implantation et la densification qu’il induit.