le 21/11/2019

Précisions apportées à la notion de soutenabilité financière dans une société anonyme de coordination

Question écrite n° 11242 de M. Jacques Bigot (Bas-Rhin - SOCR) , publiée dans le JO Sénat du 04/07/2019 - page 3488

A l’occasion d’une question écrite n°11242, publiée au Journal Officiel du Sénat le 4 juillet 2019, le sénateur Jacques BIGOT a sollicité du ministre chargé de la Ville et du Logement « […] de bien vouloir clarifier l’articulation [des] différents dispositifs d’aides aux organismes d’HLM en difficultés » et plus précisément, « […] l‘articulation entre les aides financières délivrées aux organismes d’habitations à loyer modéré par la caisse de garantie du logement locatif social en cas de difficultés et la garantie de soutenabilité financière devant être mise en place par les sociétés anonyme de coordination (SAC) prévues à l’article L. 423-1-2 du code de la construction et de l’habitation ».

Par une réponse, publiée au Journal Officiel du Sénat le 10 octobre 2019, le Ministre chargé du Logement a rappelé que la société de coordination, créée par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (« Loi ELAN ») et définie à l’article L. 423-1-2 du Code de la construction et de l’habitation (ci-après dénommé « CCH »), doit notamment « […] prendre les mesures nécessaires pour garantir la soutenabilité financière du groupe ainsi que de chacun des organismes qui le constituent, autres que les collectivités territoriales et leurs groupements […] ».

Sans revenir sur les mesures mises à la disposition de la société de coordination pour garantir cette soutenabilité financière, il convient de relever que ladite soutenabilité financière ne faisait l’objet d’aucune définition juridique.

En l’absence de définition juridique, les premiers commentateurs de la Loi ELAN ont néanmoins tenté de définir cette notion et d’en préciser les incidences sur les membres d’une société de coordination.

La Fédération des OPH a ainsi indiqué que « la notion de soutenabilité financière n’est pas définie par un texte. Tout au plus relève-t-on que la commission européenne connaît le concept de « soutenabilité de la dette », défini comme la capacité des ressources budgétaires à financer une dette future, et qu’en France la soutenabilité budgétaire est évoquée par quelques textes [tels que le décret relatif à la gestion budgétaire et comptable public de 2012, complété par une circulaire de 2017]. La combinaison de ces approches permettait d’entendre la soutenabilité financière comme la capacité du groupe et des organismes qui le constituent à présenter une situation financière leur assurant d’une part la faisabilité des opérations engagées à court terme et d’autre part la pérennité de leur activité à moyen terme. C’est donc un critère d’appréciation de la situation financière du groupe et de ses membres reposant sur une analyse à la fois rétrospective et prospective »[1]

 

Et, la Fédération des OPH a surtout ajouté que cette soutenabilité financière « […] n’équivaut pas une solidarité juridique des membres de la société de coordination envers les créanciers de la société de coordination ou d’un des membres »[2].

L’Union Sociale pour l’Habitat[3] a également confirmé « que l’existence de soutenabilité financière posée par la loi n’entraine pas d’obligation de solidarité au sens juridique entre les membres du groupe contrairement aux membres d’un GIE ».

La notion de soutenabilité, employée en finances publiques, renvoie à la capacité d’un Etat de rester solvable c’est-à-dire de conserver des marges de manœuvres budgétaires suffisantes pour honorer ses engagements.

Le principal apport de cette réponse ministérielle est donc de définir juridiquement la notion de soutenabilité financière d’un organisme HLM comme :

« […] la capacité à dégager des ressources suffisantes pour honorer ses engagements à court, moyen et long terme, c’est-à-dire la capacité à rembourser sa dette et à réaliser les investissements nécessaires à l’accomplissement de son plan stratégique de patrimoine (PSP). Les ressources financières disponibles pour investir sont assimilées dans le secteur HLM au potentiel financier, alimenté notamment par l’autofinancement d’exploitation dégagé par l’organisme chaque année ».

Le ministre chargé du Logement a en outre ajouté que « […] la société de coordination disposera des outils et informations nécessaires au suivi de la soutenabilité financière de chacun de ses associés, notamment au travers de projections financières et des résultats d’exploitation ».

Outre cette définition attendue de la soutenabilité financière et afin de répondre à la demande de clarification formulée par le sénateur Jacques BIGOT, le ministre en charge du Logement a, après avoir cité in extenso les dispositions de l’article L. 452-1 du CCH, rappelé que ces dernières confient « […] pour partie des missions similaires à la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social […] » et a précisé que ces dispositions « […] se [matérialisent] par les protocoles d’aide au rétablissement de l’équilibre et à la consolidation dont peuvent bénéficier les organismes de logement social ».

S’agissant de l’articulation entre les aides financières accordées par la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social et les mesures pouvant être mises en œuvre par la société de coordination pour garantir la soutenabilité financière du groupe d’organismes de logement social, le ministre chargé du Logement a relevé que « [l]e régime des aides de la CGLLS datant de 2008, et les sociétés de coordination étant en cours de création pour être ensuite agréées, il devra bien entendu être revu rapidement, en lien très étroit avec l’État et bien sûr le secteur HLM ».

Préconisant une réflexion basée sur la concertation de l’ensemble des parties prenantes du secteur HLM et dont l’objet est de repenser l’articulation du système actuel des aides financières accordées aux organismes HLM, le ministre chargé du Logement a précisé que cette réflexion « […] devra redéfinir, sur le modèle de ce qui existe aujourd’hui, un nouvel équilibre entre les mesures de redressement interne, les mesures de soutien des actionnaires, collectivités et éventuellement des autres membres du groupe et également la solidarité nationale qu’exerce cette caisse de garantie […] ».

[1] FEDERATION DES OPH, Guide juridique, La société de coordination, mars 2019.

[2] Ibidem.

[3] Cahier Repères, Loi ELAN du 23 novembre 2018, Principales dispositions intéressant les organismes HLM : Analyse de la direction juridique et fiscale de l’USH, janvier 2019, n°54, page n°62)