le 13/10/2016

Point de départ du délai de prescription du délit de concussion en cas de congé de fin d’activité

Cass. Crim., 29 juin 2016, n° 15-82.296

Un directeur d’une URSSAF ayant bénéficié d’un congé de fin d’activité lui ayant permis de quitter ses fonctions, le 20 mars 2007, soit huit mois avant sa retraite fixée au 30 novembre 2007, était poursuivi du chef de concussion à la suite de dysfonctionnements dans la gestion de son compte épargne-temps révélés par un audit de la Cour des comptes.

Il lui était reproché d’avoir perçu indument la somme de 91.090 euros correspondant à des congés fictifs générés par l’ouverture et l’alimentation frauduleuses de deux comptes épargne-temps.

L’employé avait soulevé, en première instance, la prescription de l’action publique estimant n’être plus, à partir de la date où il a quitté ses fonctions, soit le 20 mars 2007, chargé d’une mission de service public comme l’exigent les dispositions de l’article 432-10 du Code pénal.

Le Tribunal correctionnel avait rejeté cet argument en considérant que le point de départ du délai de prescription du délit de concussion devait être fixé au jour de la dernière des perceptions irrégulières d’argent, à savoir le jour du départ effectif du prévenu à la retraite.

Le raisonnement des Juges de première instance était validé par la Cour d’appel.

L’employé formait alors un pourvoi en cassation aux motifs, d’une part, que la Cour d’appel n’avait pas constaté l’indivisibilité des perceptions irrégulières d’argent et, d’autre part, qu’il n’était plus, à compter du 20 mars 2007, chargé d’une mission de service public.

La Chambre criminelle rejette le pourvoi en considérant que l’employé de l’URSSAF était resté jusqu’à son départ en retraite effectif, soit le 30 novembre 2007, directeur de l’URSSAF « et, de ce fait, chargé d’une mission de service public » ; elle rappelle en outre que le point de départ de la prescription triennale du délit de concussion réside dans « la dernière des perceptions irrégulières d’argent », « les opérations reprochées au prévenu » étant indivisibles.

Rappelons que la Cour de cassation avait déjà jugé que le point de départ de la prescription du délit de concussion, bien que considéré comme un délit instantané, devait être repoussé au jour de la dernière des perceptions irrégulières d’argent lorsque les actes commis sont indivisibles (Cass. Crim., 31 janv. 2007, n° 05-87.096 et n° 06-81.273, Bull. crim. n° 24).

L’intérêt de cet arrêt réside dans l’articulation par la Chambre criminelle du régime de prescription du délit de concussion et de la notion de contrat épargne-temps aux termes de laquelle un salarié peut accumuler des droits à congé rémunéré en fin de carrière, en contrepartie des périodes de congés non prises lorsqu’il était en activité.

La Chambre criminelle estime ainsi que l’employé est chargé d’une mission de service public jusqu’au terme de son congé de fin d’activité, savoir jusqu’au terme de son contrat, cette mission ne prenant pas fin au jour où il a quitté de manière effective ses fonctions et considère que le caractère indivisible des opérations litigieuses résulte du maintien de l’exercice d’une mission de service public pendant la période de congé.

Par cette méthode de caractérisation de l’indivisibilité des opérations frauduleuses, la Cour de cassation semble confondre deux critères : celui de l’exercice d’une mission de service public par l’auteur des faits et celui du caractère indivisible des perceptions irrégulières d’argent.