le 14/02/2018

Les obligations d’un promoteur immobilier n’exonèrent pas le bailleur de ses obligations à l’égard du preneur

Cass., civ., 3ème, 18 janvier 2018, n° 16-26.011

L’association « La Nouvelle étoile des enfants de France » qui a conclu avec une SCI un bail commercial portant sur un immeuble destiné à usage de crèche a également engagé une société de promotion immobilière (Solefim) pour la conception et la réhabilitation de l’immeuble. Au cours de ces travaux, celle-ci a découvert sur le toit de l’immeuble la présence de plaques de fibrociment contenant de l’amiante, qu’elle a pris l’initiative de retirer alors même que de tels travaux n’étaient pas prévus à son contrat.

L’association preneuse a alors assigné la bailleresse en paiement de la somme correspondant au prix de ces travaux de désamiantage et en réparation du préjudice financier entraîné par le retard de la livraison de l’immeuble. N’ayant pas eu gain de cause en première instance, elle a saisi la Cour d’appel de Versailles qui, par un arrêt confirmatif en date du 20 septembre 2016 a estimé « qu’en vertu du contrat de promotion immobilière, la société Solefim était tenue à une obligation de résultat qui comprenait celle d’identifier et de contrôler la conformité de l’immeuble et son opération de réhabilitation aux règles de sécurité, d’hygiène et d’urbanisme en vigueur, y compris, par conséquent, celle relatives à la présence de matériaux ou de produits en amiante ».

Cette décision a été censurée par la Cour de cassation qui a jugé « que les obligations pesant sur le promoteur immobilier envers le preneur, au titre des travaux de réhabilitation d’un immeuble loué, n’exonèrent pas le bailleur, tenu d’une obligation de délivrance, de la prise en charge des travaux nécessaires à l’activité stipulée au bail, sauf clause expresse contraire ».

La Cour de cassation a estimé que l’ensemble des motifs ainsi invoqués par la Cour d’appel était impropre à exonérer le bailleur de son obligation de délivrance telle qu’elle ressort de l’article 1719 du Code civil.

En d’autres termes, peu importe que le preneur ait conclu un contrat avec un tiers, en l’occurrence une société de promotion immobilière, le bailleur reste tenu d’une obligation de délivrance conforme à l’usage pour lequel le contrat de bail a été conclu.

Ainsi donc, les obligations naissant d’un contrat de promotion conclu entre un preneur et un promoteur immobilier ne dispensent nullement le bailleur de ses propres obligations à l’égard dudit preneur, pas plus qu’elles ne se substituent à la garantie de livraison qui lui incombe vis-à-vis de ce preneur.

Cette décision est en réalité conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation qui affirmait déjà dans un arrêt du 1er juin 2005[1] : « le bailleur ne peut, par le biais d’une clause relative à l’exécution de travaux, s’affranchir de son obligation de délivrer les lieux loués ».

Néanmoins, dans la présente décision, la Cour de cassation admet que par une « clause expresse contraire » les parties puissent convenir d’un réaménagement de l’obligation de délivrance incombant au bailleur.

[1] Civ. 3e, 1er juin 2005, n° 04-12.200.