le 09/11/2017

Obligation pour le GRD de faire droit au raccordement, comme au bénéfice de l’obligation d’achat, d’une installation photovoltaïque, à la suite de la conclusion d’une convention de raccordement et y compris en l’absence d’une proposition de raccordement

Cass. civ, 1ère, 6 octobre 2017, n°16-13546.

Par un arrêt du 6 octobre dernier, la Cour de cassation a jugé que le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité (ci-après « GRD ») doit poursuivre la procédure de raccordement d’une installation photovoltaïque, ainsi que la procédure parallèle d’obligation d’achat, dès lors que celui-ci a adressé au producteur une convention de raccordement qui a été acceptée, et sans qu’une Proposition Technique et Financière de raccordement (ci-après « PTF ») n’ait été nécessairement établie.ee

Dans cette affaire, un particulier a souhaité installer une installation de production d’électricité photovoltaïque à son domicile, revendre l’électricité produite par l’intermédiaire de l’obligation d’achat incombant à la société EDF, et bénéficier des conditions tarifaires (avantageuses) antérieures à la suspension de 3 mois de cette obligation légale d’achat (à la suite de l’entrée en vigueur du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil), dit aussi décret ou période « moratoire ».

Le 18 juin 2010, il a adressé à la société Electricité Réseau Distribution de France, désormais dénommée Enedis, une demande complète de raccordement et a retourné, le 6 décembre 2010, la proposition de raccordement au réseau adressé par la société Enedis avec un acompte. Par un courrier en date du 4 janvier 2011, la société Enedis lui a, toutefois, notifié que son projet entrait dans le champ d’application de la période susvisée de suspension de 3 mois de l’obligation d’achat de sorte que sa demande était également devenue caduque.

Certes, le particulier a dû renouveler sa demande auprès d’Enedis afin de mettre en service son installation, mais il a surtout assigné le gestionnaire aux fins de le voir condamner à lui payer une somme correspondante à la perte de chance de bénéficier d’un tarif d’achat plus avantageux de l’électricité produite par son installation. Statuant en appel sur le jugement de première instance, la Cour d’appel de Besançon avait condamné le gestionnaire du réseau à payer au producteur la somme de 5.928 euros en réparation de son préjudice, par une décision du 19 janvier 2016 contre laquelle la société Enedis s’est donc pourvue en cassation.

A l’appui de son pourvoi, la société Enedis soutenait que la procédure de raccordement au réseau public de distribution d’électricité doit être distinguée de la procédure de l’obligation d’achat. Par ce raisonnement, elle estimait que (i) le bénéfice de l’obligation d’achat, aux conditions antérieures au décret « moratoire », était soumis à la conclusion d’un contrat d’obligation d’achat avant la date d’entrée en vigueur du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 précité (c’est-à-dire avant le 10 décembre 2010), (ii) et qu’il en découlait que la conclusion d’une convention de raccordement entre le producteur et le gestionnaire du réseau (intervenue en l’espèce le 6 décembre 2010) « n’impliquait pas maintien de l’obligation d’achat au tarif antérieur en l’absence de signature d’un contrat d’achat à la date d’entrée en vigueur du moratoire ».

Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation a rejeté le raisonnement adopté par la société Enedis et a confirmé la décision de la Cour d’appel de Besançon en jugeant que le producteur :

« (…) pouvait bénéficier de la poursuite de la procédure de raccordement et prétendre à la conclusion d’un contrat d’achat d’électricité au tarif applicable à la date de demande complète de raccordement de son installation au réseau, sans que fût nécessaire la signature d’un tel contrat avant la date d’entrée en vigueur du décret ». 

En d’autres termes, ni la procédure de raccordement au réseau, ni la procédure d’obligation d’achat, ne peuvent être suspendues par le gestionnaire du réseau lorsqu’il a adressé au demandeur au raccordement une proposition de convention de raccordement que ce dernier a accepté, et ce quand bien même le gestionnaire n’aurait pas adressé à ce même producteur une proposition technique et financière de raccordement à la suite du dépôt d’une demande complète de raccordement.

Si la Cour de cassation s’est ici essentiellement prononcée sur l’interprétation à donner aux dispositions du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 précité relatif à l’obligation d’achat, on relèvera que l’arrêt commenté reconnaît que l’acceptation d’une convention de raccordement par un demandeur lui confère un effet définitif et obligatoire pour le gestionnaire du réseau en termes de coût et de délais de raccordement, y compris en l’absence de sa part d’une proposition technique et financière de raccordement.