le 20/04/2020

Marché public : le prestataire ayant réalisé des prestations supplémentaires malgré le refus préalable de l’acheteur ne peut prétendre à une indemnisation

CE, 27 mars 2020, Société Géomat, n° 426955

La jurisprudence administrative reconnait depuis longtemps au titulaire d’un marché public le droit à être indemnisé à hauteur du coût des travaux supplémentaires indispensables à la réalisation de l’ouvrage dans les règles de l’art, même si ces travaux n’ont pas été approuvés par une décision expresse de l’acheteur (CE, 14 juin 2002, Ville d’Angers, req.n° 219874 ; CE, 29 septembre 2010, Société Babel, req. n° 319481). 

Par sa décision Société Géomat du 27 mars 2020, le Conseil d’Etat précise qu’une telle indemnité n’est pas due lorsque l’acheteur a refusé ces prestations par une décision précise et préalable à leur réalisation. 

Cette précision est apportée dans le cadre d’un litige relatif au règlement d’un marché public ayant pour objet des prestations de géomètre-expert dans le cadre du remembrement d’une partie du territoire de la commune de Saint-Etienne de Montluc, conclu en 2003 par le Département de la Loire-Atlantique avec la Société Géomat. Lors de l’établissement du décompte final, le prestataire a notamment demandé le versement d’une somme de 374.081,14 euros HT correspondant à des travaux exécutés en sus des prestations initialement prévues. Le litige a été porté devant le Tribunal administratif qui a rejeté les demandes de la Société Géomat, par jugement du 2 janvier 2017. Par la suite, la Cour administrative d’appel de Nantes a, par arrêt du 9 novembre 2018, rejeté l’appel formé contre ce jugement par la Société Géomat. 

Saisi en cassation par l’entreprise, le Conseil d’Etat pose le principe suivant : « le prestataire a le droit d’être indemnisé du coût des prestations supplémentaires indispensables à l’exécution du marché dans les règles de l’art, sauf dans le cas où la personne publique s’est préalablement opposée, de manière précise, à leur réalisation ».  

Faisant ensuite application de ce principe au cas d’espèce, il relève, d’une part, que le Département de la Loire-Atlantique avait fait connaître, par courrier, son refus de rémunérer toute prestation supplémentaire fournie sans commande expresse de sa part et sans avenant et, d’autre part, que la Société Géomat n’avait pas établi pas que les prestations supplémentaires dont elle demandait l’indemnisation avaient été exécutées avant la réception de ce courrier. Le Conseil d’Etat précise également que la seule circonstance, à la supposer établie, qu’une partie des prestations litigieuses ait été réalisée à la demande de la sous-commission d’aménagement foncier de la commune de Saint-Etienne de Montluc n’est pas de nature à conférer, par elle-même, à ces prestations un caractère indispensable à l’exécution du marché dans les règles de l’art. C’est pourquoi il rejette le pourvoi de la Société requérante.