le 28/03/2019

Les apports de la loi ELAN en contentieux de l’urbanisme

Le chapitre VI de la loi ELAN prévoit diverses mesures relatives au contentieux de l’urbanisme dans le prolongement du rapport Maugüé de janvier 2018 intitulé « propositions pour un contentieux des autorisations d’urbanisme plus rapide et plus efficace ».

Ces nouvelles dispositions interviennent à la suite du décret du 17 juillet 2018 qui emportait déjà modification de plusieurs dispositions règlementaires applicables au contentieux de l’urbanisme (précédemment analysées dans la LAJ du 18 octobre 2018).

L’objectif clairement affiché dans le cadre de la loi ELAN est l’amélioration du traitement du contentieux de l’urbanisme, en vue de satisfaire les ambitions de construire plus de logements dans des délais raccourcis. Les dispositions relatives au contentieux, toutes issues de l’article 80 de la loi, sont entrées en vigueur le 1er janvier 2019.

Elles concernent :

– les effets des annulations et des déclarations d’illégalité des documents d’urbanisme ;

– l’intérêt à agir des associations et des voisins à l’encontre des autorisations d’urbanisme ;

– les recours abusifs ;

– le déroulé de l’instance ;

– l’action en démolition du préfet.

 

1- La limitation des effets des annulations et des déclarations d’illégalité des documents d’urbanisme

Le nouvel article L. 600-12-1 du Code de l’urbanisme prévoit que lorsqu’un document d’urbanisme a été annulé ou déclaré illégal pour des raisons étrangères au droit des sols de la zone où est situé un permis de construire délivré avant l’annulation précitée, ce seront toujours les règles de ce document d’urbanisme qui s’appliqueront, sans qu’il soit nécessaire de faire application des règles généralement obsolètes du document d’urbanisme antérieur.

Par ailleurs et s’agissant en particulier des règles applicables au sein des lotissements (article L. 442-14 du Code de l’urbanisme), il est prévu de maintenir la cristallisation des règles d’urbanisme applicables sous réserve que le motif d’annulation soit étranger aux règles d’urbanisme applicables au sein du lotissement.

 

2- Les restrictions à l’intérêt à agir des associations et des voisins à l’encontre des autorisations d’urbanisme

Selon l’article L. 600-1-1 du Code de l’urbanisme, une association n’est désormais recevable à agir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation des sols que si le dépôt de ses statuts est intervenu au moins un an avant l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire.

S’agissant des tiers, la nouvelle rédaction de l’article L. 600-1-2 exclut désormais que les troubles de jouissance résultant de la phase travaux puissent permettre de justifier d’un intérêt à agir.

 

3- Les recours abusifs

La procédure pour recours abusif prévue par l’article L. 600-7 – jusque-là peu utilisée ou admise – est également amendée. Il est ainsi proposé de substituer « lorsque le droit au recours […] est mis en œuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant » par « lorsque le droit au recours […] est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant ». La condition du caractère « excessif » du préjudice serait également supprimée.

Les transactions financières avec les associations sont également encadrées – voire très limitées – puisqu’en application de l’article L. 600-8, elles ne peuvent y recourir que pour la sauvegarde de leur biens matériels. Par ailleurs, les mêmes dispositions prévoient, qu’à l’instar des transactions intervenues en cours d’instance, les transactions « précontentieuses » sont également soumises à enregistrement.

 

4- Le déroulé de l’instance à l’encontre des autorisations d’urbanisme

Sur ce point, il est désormais imposé aux juridictions administratives, lorsque l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme (article L. 600-5) ou un sursis à statuer aux fins de régularisation (article L. 600-5-1) est envisageable, de motiver leur refus de faire application de ces dispositions.

L’article L. 600-5-2 précise, pour sa part, que toute décision d’urbanisme modificative ou de régularisation délivrée en cours d’instance et communiquée aux parties pourra seulement être contestée par ces dernières dans le cadre de cette instance.

S’agissant du déroulé de l’instance, il convient de noter également qu’une demande de référé suspension contre une autorisation d’urbanisme ne sera plus recevable après l’expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens (article L. 600-3).

 

5- L’action en démolition du préfet

À noter enfin, le rétablissement de la possibilité pour le préfet de solliciter, par une action civile, la démolition d’une construction dont l’autorisation a été définitivement annulée sans avoir à respecter les conditions posées par les dispositions de l’article L. 480-13 1° du Code de l’urbanisme. Le permis de construire devra néanmoins avoir été au préalable annulé sur déféré préfectoral.

 

Par Arthur Gayet,
Avocat Senior référent, Seban & Associés