le 21/06/2018

La signature du dirigeant et sa portée à l’égard de l’entreprise

Cass., Com., 9 mai 2018, n° 16-28157

Le nouvel article du Code civil L.1367 (ancien 1316-4 )pose le principe selon lequel « la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte ».
Cette disposition a souvent posé des difficultés d’interprétation sur le point de savoir si la signature du dirigeant ou associé d’une société l’identifie ou l’engage personnellement à l’égard des actes accomplis pour le compte de celle-ci. En d’autres termes, comment savoir si la signature du dirigeant l’engage personnellement ou n’engage exclusivement que l’entreprise qu’il représente ?
La lecture de ces trois arrêts de la Cour de cassation permet de répondre à cette préoccupation.
-  Les faits ayant donné lieu au premier arrêt (Cass., Com., 22 février 2005, n° 03-16398) font état d’une société de fait créée entre deux vétérinaires pour l’exercice en commun de leur activité alors qu’ils étaient par ailleurs associés dans d’autres sociétés et que l’un d’entre eux était associé unique d’une société unipersonnelle. Ces deux vétérinaires ont convenu de trois cessions subordonnées à la conditions suspensive de deux autres cessions. Mais pour la signature d’un l’accord, l’associé de la société unipersonnelle n’agissait pas ex qualité de sorte que cette société a été mise hors de cause alors que les requérant entendaient engager sa responsabilité.
La Cour de cassation a effet jugé que « d’une part, le dirigeant n’engage en principe la société que par les actes qu’il accomplit en qualité de mandataire social et qu’à défaut de mention de cette qualité, il appartient au tiers contractant de faire la preuve que le dirigeant a eu et manifesté la volonté d’agir au nom et pour le compte de la société ».
 – Dans la deuxième espèce (Cass., 3ème civ., 12 septembre 2006, n° 03-19277), une personne a été assignée tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentant d’une société, en paiement d’un solde d’honoraires en raison d’une faute qui aurait été commise dans l’exécution des prestations de la société.
Mais la Cour de cassation a jugé que le nom du défendeur n’étant indiqué que sous la rubrique « nom du représentant légal ou statutaire de la personne morale », il n’avait contracté qu’en sa seule qualité de gérant de la société.

 – Dans la dernière espèce (Cass., Com., 9 mai 2018, n° 16-28157) un contractant déclarant agir tant en son nom personnel qu’au nom de la société dont il était associé a conclu avec une autre société un contrat portant sur l’entretien d’un parcours de golf. Mais il n’a signé le contrat qu’une seule fois. La société au nom de laquelle il a agi ayant été placée en liquidation judiciaire sans avoir réglé les échéances prévues au contrat, la société prestataire de service d’entretien a engagé des poursuites contre l’associé en recouvrement des sommes impayées. L’associé s’était par ailleurs personnellement engagé, au moyen de plusieurs chèques, à payer les sommes dues, mais ils n’ont pu être encaissés pour avoir été révoquées.
Si les juges d’appel n’avaient pas retenu sa responsabilité faute de signature de l’acte à titre personnel, au contraire la Cour de cassation a estimé qu’une telle exigence n’était pas nécessaire dès lors que l’intéressé agissait en une double qualité, à la fois à titre personnel et en qualité de représentant d’un tiers.

Une lecture combinée de ces trois arrêts de la Cour de cassation permet d’affirmer que si en principe le dirigeant ou l’associé n’engage la société que par les actes qu’il accomplit en qualité de mandataire social (Cass., Com., 22 février 2005, n° 03-16398), il n’agit en revanche qu’en sa seule qualité de représentant légal de la société lorsque son nom se réfère expressément à sa qualité de représentant légal (Cass., 3e civ., 12 septembre 2006, n° 03-19277).
Cependant, même si l’acte dont il est signataire ne comporte qu’une seule signature, celle-ci est suffisante pour l’engager personnellement dès lors qu’il intervient en une double qualité, à la fois à titre personnel et en qualité de représentant de la société ou plus globalement d’un tiers (Cass., Com., 9 mai 2018, n° 16-28157).

Cass., Com., 22 février 2005, n° 03-16398

Cass., 3ème civ, 12 septembre 2006, n° 03-19277