le 14/01/2021

Délibération de la CRE relative au projet d’ordonnance de transposition de la Directive du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité

CRE, 17 décembre 2020 délibération portant avis sur le projet d’ordonnance portant transposition de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE

Par une délibération du 17 décembre 2020, la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE)  a rendu son avis sur le projet d’ordonnance portant transposition de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant  des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE.

La Directive relative au marché intérieur de l’électricité fait partie du « paquet énergie propre » approuvé en 2018 et 2019 par les instances européennes et regroupant huit directives et règlements procédant à une refonte des règles applicables en matière énergétique (Voir notamment nos commentaires dans les Lettres d’Actualité Juridique Energie Environnement des mois de juillet 2017, novembre 2018, juillet 2020).

La Directive du 5 juin 2019 vise plus spécifiquement à adapter le fonctionnement du marché concurrentiel aux exigences de la transition énergétique, particulièrement en améliorant les conditions d’accès au marché de l’électricité d’origine renouvelable ou des solutions de flexibilité telles que le stockage de l’électricité ou l’agrégation de multiples sources distribuées de flexibilité, et en renforçant la participation active des consommateurs à la transition énergétique. On précisera que si le délai de transposition de la directive expirait le 31 décembre 2020, les circonstances liées à la crise sanitaire survenue en 2020 n’ont pas permis de respecter ce délai. Le projet d’ordonnance n’a ainsi pu être transmis par le Gouvernement à la CRE que le 18 novembre 2020.

Parmi les principales dispositions du projet d’ordonnance et de la délibération de la CRE, on citera les éléments suivants.

Tout d‘abord, au sein du projet d’ordonnance, de nombreuses dispositions concernent le renforcement de la protection des consommateurs et procèdent à des modifications en ce sens du Code de la consommation et du Code de l’énergie. Parmi ces modifications, on mentionnera notamment :

  • Le renforcement de l’information du consommateur par des compléments apportés à la liste des informations précontractuelles qui doivent être transmises par les fournisseurs aux consommateurs, la précision des modalités de mise à disposition des informations précontractuelles en prévoyant la transmission d’une synthèse des principales dispositions contractuelles, ou encore la précision des informations à transmettre aux consommateurs finals qui ont conclu un contrat aux tarifs réglementés de vente sur l’existence des offres de marché et du comparateur d’offres du Médiateur National de l’énergie. La CRE émet un avis favorable concernant ces dispositions qui, selon elle, « transposent fidèlement les dispositions de la Directive ».
  • Le renforcement de l’effectivité du droit des consommateurs à changer de fournisseur d’électricité, notamment par l’encadrement des délais maximaux dans lesquels ce changement est réalisé. Si la CRE émet globalement un avis favorable sur ces dispositions, elle déplore néanmoins l’absence de transposition dans le projet soumis de l’interdiction de facturation de frais de résiliation en cas de changement de fournisseur à certains segments de la clientèle (consommateurs non domestiques souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kVA).

Ensuite, le projet d’ordonnance introduit, dans le Code de l’énergie et dans le Code de la consommation, la notion d’offre à tarification dynamique issue de la Directive du 5 juin 2019.

La CRE relève ainsi que la définition de l’offre à tarification dynamique contenue dans l’ordonnance et qui devrait figurer au sein du nouvel article L. 332-7 du Code de l’énergie est identique à celle de la Directive qui prévoit qu’il s’agit d’une offre « qui reflète les variations de prix sur les marchés au comptant, notamment les marchés journaliers et infrajournaliers, à des intervalles équivalant au moins à la fréquence du règlement du marché à destination des consommateurs finals ».

La CRE émet en revanche une recommandation consistant à préconiser l’ajout dans l’ordonnance d’une disposition permettant de garantir l’accès à ce type d’offre aux clients équipés d’un compteur intelligent situés sur le territoire d’une Entreprise Locale de Distribution (ci-après, ELD) approvisionnant moins de 200.000 clients finals, et ce en conformité avec les dispositions de la Directive.

Des dispositions relatives à l’information précontractuelle devant être délivrée aux clients préalablement à la souscription d’une offre à tarification dynamique sont introduites par l’ordonnance. En particulier, il est prévu que le client est informé au moyen d’un document d’information contenant notamment « une simulation personnalisée de l’impact d’une variation des prix sur les marchés au comptant ». La CRE émet cependant un avis défavorable sur la proposition formulée, qu’elle estime peu opportune et peu réaliste, faute notamment pour les fournisseurs d’avoir accès de manière systématique aux données de consommation des clients. La CRE suggère de remplacer cette simulation par une obligation pesant sur le fournisseur et consistant à mettre à la disposition du consommateur un dispositif d’alerte en cas de variation forte des prix de marché.

Le projet d’ordonnance introduit par ailleurs un certain nombre de dispositions intéressant l’activité de distribution d’électricité. En particulier, l’article 15 du projet d’ordonnance modifie les dispositions de l’article L. 322-9 du code de l’énergie et prévoit un encadrement des modalités de recours, par les gestionnaires de réseau de distribution (GRD), à des services auxiliaires et à des services de flexibilité. Toutefois, la CRE relève que cette disposition ne transpose pas correctement et complètement les dispositions de la Directive en renvoyant à un texte réglementaire le soin de préciser le rôle de la CRE pour encadrer le recours à ces services. Selon la CRE, un tel texte réglementaire n’est pas requis par la Directive. La CRE rend en conséquence un avis défavorable sur ce point.

Le même article 15 transpose en outre les dispositions de la Directive prévoyant l’obligation pour les GRD d’établir un plan de développement de leur réseau. Néanmoins, là encore, la CRE émet un avis défavorable sur le projet en tant qu’il renvoie à des dispositions réglementaires le soin de préciser les conditions dans lesquelles la CRE sera amenée à demander la modification du plan de développement du réseau.

Le projet d’ordonnance transpose en outre en droit interne les dispositions de la directive relatives au stockage d’électricité, notamment en introduisant une définition de cette activité au sein du Code de l’énergie. La CRE accueille favorablement cette introduction ainsi que le choix fait par le Gouvernement de ne pas transposer, comme cela est pourtant permis par la Directive, la possibilité, sous certaines conditions, pour les gestionnaires de réseaux d’être propriétaires d’installations de stockage d’énergie ou à les développer, les gérer ou les exploiter en cas de carence de l’initiative privée.

Enfin, le projet d’ordonnance introduit d’autres dispositions relatives aux mécanismes d’effacement, à l’activité de transport d’électricité ou encore à l’extension des missions de la CRE. Sur ces différents sujets, la CRE émet un avis favorable au projet d’ordonnance.