le 09/07/2015

De la prescription en matière de presse – Rappel des principes fondamentaux

Cass. Crim., 17 février 2015 n° 13-88.129

Le Maire d’une Commune était cité à comparaître devant le Tribunal correctionnel le 7 janvier 2013, des chefs d’injure et diffamation publiques envers un particulier, à la suite de propos tenus par celui-ci lors d’un conseil municipal ; par jugement du même jour, le Tribunal fixait le montant de la consignation de partie civile.

Après débats lors de l’audience du 1er mars 2013, le jugement au fond était rendu le 8 avril suivant ; le procureur ainsi que le prévenu interjetaient appel de cette décision.

Le 28 octobre 2013, la Cour d’appel annulait le Jugement du 8 avril 2013 et constatait l’acquisition de la prescription extinctive de l’action publique (forclusion de 3 mois) ; elle retenait « qu’en l’état de cette annulation, la prescription a couru du précédent jugement, en date du 7 janvier 2013, par lequel le tribunal avait fixé la consignation à verser par les parties civiles, que le mandement de citation du procureur général [acte du Parquet mettant le dossier en état devant la Cour d’appel], seul acte interruptif de prescription, est intervenu le 11 juin 2013 et qu’un délai de plus de trois mois s’est donc écoulé entre ces deux actes ».

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel : « Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors que la prescription de l’action publique a été interrompue par l’audience des débats du 1er mars 2013, dont le déroulement est attesté par les notes d’audience tenues par le greffier et signées par le président, conformément à l’article 453 du Code de procédure pénale, puis suspendue pendant la durée du délibéré du tribunal correctionnel, peu important que le jugement prononcé ait été ultérieurement annulé, la Cour d’appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ».

La Chambre criminelle a pris soin de rappeler au préalable, dans un attendu de principe, « que si l’action publique résultant d’une infraction prévue par la loi du 29 juillet 1881 se prescrit après trois mois révolus à compter du jour où l’infraction a été commise, ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait, la prescription est interrompue par l’audience à laquelle ont lieu les débats, et suspendue pendant la durée du délibéré, les parties poursuivantes étant alors dans l’impossibilité d’accomplir un tel acte de procédure avant le prononcé du jugement ».

La portée de cet arrêt est intéressante à plusieurs titres.

La Chambre criminelle rappelle le régime de la prescription trimestrielle des actions publiques et civiles, applicable aux délits de presse (infractions de la loi du 29 juillet 1881) :

–    le point de départ de la prescription est fixé à la date du premier acte de publication par lequel le délit est consommé ;

–    ce délai de 3 mois peut être interrompu par un acte d’instruction ou de poursuite, conformément aux dispositions de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881.

Dans ce cadre, la Chambre criminelle rappelle que l’audience de fond (des débats) devant le Juge pénal a elle-même un effet interruptif de prescription (remise à zéro du délai de 3 mois) et que le délai de prescription est suspendu (le délai ne court pas) durant la période pendant laquelle l’affaire est mise en délibéré (soit jusqu’au prononcé du jugement).