le 14/06/2017

Le Conseil Constitutionnel censure les dispositions relatives à la durée des émissions diffusées par les partis politiques lors des élections législatives

Décision n° 2017-651, QPC du 31 mai 2017

Sur renvoi du Conseil d’Etat saisi en référé par l’association « En marche ! », le Conseil Constitutionnel s’est prononcé sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L. 167-1 du Code électoral, et, plus précisément, de ses paragraphes II et III.

Ces dispositions fixent les conditions d’accès, pour les partis et groupements politiques, aux antennes du service public de radiodiffusion et de télévision dans le cadre de la campagne officielle en vue des élections législatives. 

Deux situations sont distinguées, selon que les partis ou groupements politiques sont représentés ou non par des groupes parlementaires à l’Assemblée nationale.

Les premiers (relevant du II de l’article L. 167-1 du Code électoral) bénéficient d’une durée totale d’émission de trois heures au premier tour et d’une heure trente au second tour du scrutin, lesquelles sont réparties en deux séries égales entre les partis et groupements qui appartiennent à la majorité et ceux qui ne lui appartiennent pas. 

Les seconds (relevant du III de l’article L. 167-1 du Code électoral) peuvent, à leur demande, bénéficier d’une durée d’émission de sept minutes au premier tour et de cinq minutes au second tour du scrutin.

C’est cette différence de traitement qui était critiquée par l’association requérante.

Le Conseil Constitutionnel, qui rappelle qu’il est loisible au législateur « d’arrêter des modalités tendant à favoriser l’expression des principales opinions qui animent la vie démocratique de la Nation et de poursuivre ainsi l’objectif d’intérêt général de clarté du débat électoral », c’est-à-dire de réserver un temps d’antenne spécifique aux partis et groupements représentés à l’Assemblée nationale à renouveler, précise par ailleurs que les partis et groupements politiques non représentés à l’Assemblée nationale doivent bénéficier d’un « accès aux antennes du service public de nature à assurer leur participation équitable à la vie démocratique de la Nation et à garantir le pluralisme des courants d’idées et d’opinions ».

En l’espèce, compte tenu de l’écart entre la durée d’émission sur les antennes du service public pour les partis ou groupements politiques représentés à l’Assemblée nationale et ceux non représentés, et de la circonstance que, pour les seconds, « les durées d’émission sont fixées de manière identique, sans distinction selon l’importance des courants d’idées ou d’opinions qu’ils représentent », les Sages soulignent que le temps d’émission dont ils peuvent bénéficier peut être significativement inférieur à celui prévu pour les premiers et ainsi « ne pas refléter leur représentativité ».

Considérant que les dispositions contestées peuvent conduire à l’octroi d’un temps d’antenne manifestement hors de proportion avec la participation à la vie démocratique de la Nation de ces partis et groupements politiques, le Conseil constitutionnel censure les paragraphes II et III de l’article L. 167-1 du Code électoral au titre de la méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l’article 4 de la Constitution (prévoyant que la loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation) et d’une atteinte disproportionnée à l’égalité devant le suffrage.

Usant de la faculté prévue à l’article 62 de la Constitution, le Conseil constitutionnel reporte l’abrogation de ces dispositions au 30 juin 2018.

Toutefois, et afin, selon les propres termes de la décision, de « faire cesser l’inconstitutionnalité constatée » en vue des législatives des 11 et 18 juin 2017, les Sages ont prévu un mécanisme correctif transitoire.

Ainsi, en cas de disproportion manifeste entre le temps d’émission accordé à un parti ou groupement relevant du III de l’article L. 167-1 du Code électoral et celui accordé aux partis et groupements relevant du II du même article, un parti relevant de cette première catégorie peut bénéficier, au regard de sa représentativité, d’un temps d’antenne supérieur aux sept et cinq minutes prévues par la loi, dans la limite du quintuple de ces durées respectives.