le 12/04/2018

Cession de réseaux câblés : valeur actuelle et modernisation à moindre coût – l’appréciation par le juge de la régularité d’une cession

Par quatre décisions, le juge administratif s’est prononcé sur la question de la valorisation des réseaux câblés à la suite de la résiliation des contrats d’exploitation conclus avec Numéricâble, cette dernière se substituant en cours d’exécution à des sociétés locales.

Dans les trois arrêts rendus concernant la Communauté d’agglomération Val de Fensch, plusieurs communes avaient confié l’établissement et l’exploitation, à titre exclusif, d’un réseau distribuant par câble des services de radiodiffusion et de télévision à la société Numéricâble. À la suite du transfert de compétence au bénéfice de la communauté d’agglomération, ces communes ont initié la résiliation desdites conventions

Dans le dernier arrêt, la Commune de Sainte Marie aux Chênes a pris la décision de mettre un terme à la délégation de service public la liant à la société Numéricâble lui confiant la réalisation et l’exploitation, pour une durée de trente ans, d’un réseau câblé de vidéocommunication.

Dans ces quatre espèces, un protocole transactionnel a été conclu par lequel le prix de cession du réseau correspondait à l’indemnité que la collectivité entendait allouer au titulaire du contrat, en contrepartie de la fin de l’exclusivité consentie par la convention résiliée. La Préfecture a introduit un déféré préfectoral en contestant la régularité de ces protocoles transactionnels.

Retenant la compétence de la juridiction administrative, dès lors que le litige que le protocole entend prévenir est lié à la résiliation d’une convention de délégation de service public, le juge s’attarde sur la réalité de l’estimation faite de la valeur du réseau cédé. Et il va procéder à une analyse par projection. En effet, il considère que la valeur du réseau ne pouvait se réduire à la seule valeur résiduelle non amortie au jour de la cession. Il relève que la modernisation d’un réseau câblé par le déploiement de la fibre optique pourra être réalisée à moindre coût dès lors que ne seront pas à la charge du cessionnaire ni les travaux de génie civil ni les travaux de réalisation de nouveaux branchements, qui constituent l’élément le plus coûteux dans la construction d’un nouveau réseau.

Le juge adhère ainsi à la méthode d’évaluation selon « l’actualisation des cash-flows futurs » en estimant la valeur du réseau en y intégrant les potentialités de sa reconversion ou de sa modernisation. Le juge intègre donc dans son analyse les avantages qui sont procurés au bénéficiaire de la cession. Dans un secteur des Telecom où la présence des opérateurs demeure l’enjeu majeur, la cession d’un réseau constitué d’ouvrages de génie civil offre une valorisation évidente au cessionnaire par le déploiement, facilité, de la fibre optique en vue d’une commercialisation d’une offre d’accès mixte, type FttLA.

Aboutissant in fine à une valeur supérieure à celle retenue pour les cessions déférées, le juge retient donc la libéralité consentie par les collectivités et annule les protocoles transactionnels, retenant une prise d’effet décalée concernant la Communauté d’agglomération Val de Fensch.

TA Strasbourg, 7 février 2018, Communauté d’agglomération Val de Fensch, n° 1602373 (Uckange)
TA Strasbourg, 7 février 2018, Communauté d’agglomération Val de Fensch, n° 1602374 (Florange)
TA Strasbourg, 7 février 2018, Communauté d’agglomération Val de Fensch, n° 1602375 (Fameck)
TA Strasbourg, 7 février 2018, Commune de Ste Marie aux Chênes, n° 1505433